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Centre de santé de Sainte-Brigitte-de-Laval : rencontre avec Véronique Loubier

– Derrière chaque réussite entrepreneuriale se trouve de la créativité, des prises de décision, de l’audace. En économie sociale, il se trouve également un besoin d’agir collectivement. Par une série de portraits, le PôleCN vous présente des histoires d’entreprises d’économie sociale (EÉS) en mettant en lumière les parcours des entrepreneur·e·s qui les nourrissent par leurs expériences et leur vision de l’idée d’entreprendre ensemble.

Le Centre de santé de Sainte-Brigitte-de-Laval a fait couler beaucoup d’encre au cours des derniers mois ! Lancement d’un service novateur de télémédecine puis du projet de revue « Le bonheur est simple », la coopérative de solidarité ne cesse de se réinventer, au gré des besoins exprimés par sa communauté d’appartenance. Le PôleCN a eu la chance de rencontrer la directrice générale de l’organisation, Véronique Loubier, dans les installations du centre de santé collectif. Portrait d’une gestionnaire « de terrain » résolument dédiée à la mission de son organisation.

D’organisatrice communautaire à gestionnaire : un bagage et des expertises qui se complémentent

Issue d’une famille élargie nombreuse et impliquée dès son tout jeune âge dans divers projets, Véronique Loubier est nourrie par ces expériences collectives : « Ça m’allumait ! Je suis une fille qui a besoin de cette énergie issue de la collectivité, cette idée de travail d’équipe, de créer ensemble. C’est donc du plus longtemps que je me souvienne que ça fait partie de moi, de ma personnalité. Ça s’est développé avec les expériences de vie et professionnelles encore plus, mais il y avait quand même cette fibre-là, de se dire ça n’a pas d’allure cette situation, ça n’existe pas, bien faisons-le ! »

Véronique fait carrière en intervention sociale, puis en développement, et s’établit, en 2009, à Sainte-Brigitte-de-Laval avec sa famille. « En tant que jeune maman, j’ai moi-même vécu les conséquences du manque de services de santé sur le territoire, tout comme les gens qui m’entourent. » C’est également par son travail dans la région qu’elle constate des lacunes importantes en santé et services sociaux pour sa propre municipalité : « dès mon arrivée, je me disais qu’un jour, j’allais faire quelque chose pour Sainte-Brigitte. C’était clair, net et précis. »

Se doter de services en santé là où il n’y en a pas

Comme toute entreprise d’économie sociale, le Centre de santé de Sainte-Brigitte-de-Laval est né d’un besoin ressenti et identifié par la communauté, soit d’un manque en matière de soins et de promotion de la santé à proximité. La municipalité de Sainte-Brigitte-de-Laval a vu sa population doubler en moins d’une décennie, elle représente aujourd’hui la deuxième plus jeune ville du Québec.

Dès les premières consultations publiques concernant le projet de centre de santé, Véronique reconnaît cet esprit d’entraide et cette mobilisation citoyenne qui la fait autant vibrer. « C’est important quand on veut s’impliquer d’aller voir et d’oser ! On doit sentir que le noyau avec lequel on travaille peut aller loin. Je regardais le projet et je me suis dit : oui, ce sont des gens avec lesquels je me vois évoluer. Je pense qu’on a ce qu’il faut pour mener à terme cette grande aventure. » Véronique s’implique donc dès la création d’un comité officiel provisoire. Moins de deux ans après la première rencontre citoyenne, le Centre de santé de Sainte-Brigitte-de-Laval, constituée en coopérative de solidarité, ouvre ses portes en janvier 2017 avec Véronique à sa direction.

Centre de santé Sainte-Brigitte-de-Laval

La nouvelle gestionnaire avait tout de même complété un baccalauréat et un certificat en gestion des organismes de la santé, avant de se lancer dans ce grand défi qu’est la direction générale d’une coopérative de santé en émergence. Par contre, elle ne croit pas que ce sont ces notions académiques qui ont façonné le type de gestionnaire qu’elle est devenue : « c’est une question de personnalité, d’instinct et d’approche, bien plus que tous les outils du monde que tu peux utiliser. La gestion, c’est écouter, déléguer, analyser, agir et interagir de manière constructive et bienveillante. C’est aussi simple que ça ! Ça ne demande pas un million de connaissances, mais beaucoup de persévérance. Ça demande d’être capable d’analyser rapidement, de voir ou de devancer les problèmes avant qu’ils arrivent et de mobiliser ton monde pour faire sortir le meilleur de chaque personne. C’est très collé sur le travail social ou sur l’organisation communautaire quand tu regardes ça ! »

Je pense qu’un directeur qui a fait du terrain ou qui fait du terrain est un meilleur directeur. C’est quand on oublie et qu’on s’éloigne de la base qu’on prend des mauvaises décisions.

En mode collectif : force résiliente et créatrice

Gestion du stress et confiance durant les périodes sombres, un-e gestionnaire d’entreprise doit faire preuve de résilience pour affronter les différentes situations qui se présenteront à lui ou à elle. Si personne n’est à l’abri de l’épuisement ou du découragement, le partage des risques au sein d’un groupe peut faire la différence. Pour Véronique, ce passage de flambeau est possible avec son équipe et son conseil d’administration : « Chez nous, on a un c.a. très impliqué, étant à nos premières années de vie. Je ne pourrais pas faire mon travail sans eux, ce sont des éléments très importants. Chacun donne son maximum. Quand un est fatigué, tout le monde prend le relais. Dans le fond, c’est une énergie qui circule. On prend les coups durs et les bons coups ensemble. »

Si la gouvernance démocratique et collective est un élément distinctif des entreprises d’économie sociale, Véronique voit aussi en cette forme d’entrepreneuriat un caractère innovant et créatif : « On a les mêmes défis que les entreprises privées. On veut tous être rentables comme entreprise. Par contre, les coopératives et les OBNL sont vraiment un terreau fertile pour faire les choses différemment. On innove davantage et on prend plus de risques parce qu’il est partagé collectivement. On peut aller plus près des besoins lorsqu’on est en économie sociale. On a les outils, une structure flexible et la base assez solide pour le faire. »

Des soins humains, plein de sens

Ce caractère novateur prend tout son sens pour le Centre de santé qui évolue dans un secteur d’activité longtemps occupé uniquement par des institutions publiques et privées. La coopérative comble des besoins non répondus par les autres parts : « c’est ça la beauté, on a une plus grande marge de manœuvre action-réaction. On est collé sur la base, sur notre communauté. Je dis aux gens de ne pas hésiter à nous demander quoi que ce soit. On fait le tour de la question et si on trouve que c’est une bonne idée on va l’essayer c’est sûr. »

Pour Véronique Loubier, le Centre de santé Sainte-Brigitte-de-Laval permet de se reconnecter avec le véritable sens des soins de santé : une approche de proximité mettant le patient au cœur des actions. Avec les nombreux projets et défis qui attendent le centre, elle espère que perdurera l’énergie positive qui circule entre les membres de son équipe, le conseil d’administration et la clientèle. Tous nos vœux de prospérité au Centre de santé, à sa gestionnaire et à la population qu’il dessert !

 

 

*Crédit pour la photo de Véronique Loubier: Manon Dumas