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Coop de l’arbre : rencontre avec Antoine Suzor-Fortier

– Derrière chaque réussite entrepreneuriale se trouve de la créativité, des prises de décision, de l’audace. En économie sociale, il se trouve également un besoin d’agir collectivement. Par une série de portraits, le PôleCN présente des histoires d’entreprises d’économie sociale (EÉS) pour mettre en lumière des parcours d’entrepreneur·e·s avec de riches expériences et une vision inspirante de l’idée d’entreprendre ensemble.

La Coop de l’arbre a fait de sa mission environnementale — la mise en valeur de l’arbre — l’origine, le cœur et le moteur de son projet d’entreprise. En activité depuis 2007, l’entreprise d’économie sociale de Baie-St-Paul se démarque par la diversité et le rayonnement de ses actions, mais aussi par sa volonté de demeurer libre et flexible aux aspirations de ses membres. Rencontre avec Antoine Suzor-Fortier, cofondateur et coordonnateur de la Coop de l’arbre.

Se rassembler autour d’une cause

Les prémisses de la Coop de l’arbre sont issues de la rencontre entre deux personnes qui partageaient l’idée que les services d’élagage des arbres devaient comprendre une dimension plus globale, incluant notamment la valorisation des résidus verts, une vision écoforestière et la sensibilisation à l’environnement.

Crédit photo: Coop de l’arbre

L’entreprise a pris la forme d’une coopérative de solidarité avec au sein de son équipe un écoconseiller et un entrepreneur d’expérience gestionnaire en environnement. Elle a rassemblé au fil des ans des membres provenant de milieux bien différents, mais qui partagent tous les mêmes valeurs et la même passion, celle de s’engager pour la cause environnementale avec des actions concrètes. Les activités de l’entreprise s’articulent autour de trois grands volets : l’arboriculture, l’écoforesterie et l’éducation à l’environnement.

Coopération et liberté

La décision de constituer l’entreprise en coopérative de solidarité provient de la liberté que procure la forme juridique. Pour Antoine Suzor-Fortier, la coop de solidarité comprend les avantages de la coopérative et ceux de l’obnl, permettant ainsi de travailler sur différents tableaux financiers et d’intégrer directement les travailleurs dans le processus décisionnel. Tous les fondateurs étaient d’avis que les valeurs que sous-tend le modèle coopératif correspondaient à leur vision entrepreneuriale.

« La coopération, par définition, je trouve que c’est un des beaux mots de la langue française. C’est un peu la base de tout philosophiquement ; dans la nature, partout. Au niveau de l’entreprise, ça permet aux travailleurs d’être impliqués au sein du conseil d’administration. On veut la séparation des pouvoirs dans plusieurs structures publiques, dans plusieurs réalités, mais dans les petites entreprises à valeur environnementale, éthique, sociale ou autre, je trouve que le travailleur à sa place au sein du conseil d’administration au lieu de la classique séparation conseil d’administration vs opération. Cela amène un sentiment plus important de responsabilité pour le travailleur et rend la Coopérative davantage en phase avec son opération. »

Comme coopérative non affiliée à une grande fédération, les membres de la Coop de l’arbre sont plus libres dans leurs actions. Cela leur permet d’être constamment en harmonie avec leurs besoins, avec la mission qu’ils se sont dotés et avec les opportunités qu’ils décèlent autour d’eux.

La Coop de l’arbre innove donc dans ses actions, mais aussi dans sa forme. En effet, en offrant une structure organisationnelle éclatée à ses membres, misant sur la liberté, mais appelant à la responsabilité, elle déroge du modèle conventionnel et leur propose un milieu adapté à eux. « Aujourd’hui, je pense que les entreprises vont de plus en plus être appelées à se structurer comme ça », affirme Antoine Suzor-Fortier.

Cette indépendance de pensée et d’action est d’ailleurs très précieuse pour lui, alors qu’il était préalablement un militant environnemental qui ne se destinait pas nécessairement à l’entrepreneuriat.

Marginalement entrepreneur

« J’ai toujours créé mon emploi, même avant la Coop de l’arbre », mentionne le coordonnateur en poste depuis maintenant 12 ans, mais travailleur autonome depuis l’âge de 17 ans. « Finalement, même si je travaille plus d’heures que la moyenne des gens, je n’ai jamais eu l’impression de travailler puisque je crée les projets qui m’intéressent et me motivent », mentionne-t-il. Il est d’avis que les Québécois sont nombreux à vouloir sortir des sentiers battus au niveau de leur carrière : « Je pense que les gens sont très entrepreneurs dans leur vie au Québec. Ils changent, ils se remettent en question, ils évoluent. Il y a quand même ici quelque chose de moins statique que j’ai vu ailleurs et je pense que j’en suis tout simplement un bon représentant. »

Avec cette liberté d’agir propre à l’entrepreneur ou au travailleur autonome résulte également un niveau d’engagement plus élevé face à son travail. Selon Antoine Suzor-Fortier, le rapport aux priorités n’est pas le même lorsqu’on choisit l’entrepreneuriat. Il faut travailler beaucoup et l’équilibre de vie n’est pas nécessairement au rendez-vous.

Avoir une vision à moyen terme est également un atout pour l’entrepreneur. Il faut du temps pour organiser durablement les activités d’une organisation, l’amener là où nous l’imaginons : « quand j’ai commencé avec la coop, je me disais que j’en aurais pour 10 ans et que je ferais autre chose après ce temps. Mais après 10 ans, je trouve que ça commence tout juste à avoir de l’allure, à être bien, en regard à mon niveau d’exigence somme toute assez élevé. »

Entreprendre en économie sociale, c’est différent?

Pour Antoine Suzor-Fortier, les dirigeants de petites entreprises d’économie sociale d’une quinzaine d’employés comme la Coop de l’arbre ont un rapport aux priorités qui ressemblent à celui d’un chef d’une entreprise privée. Tout entrepreneur, peu importe la forme juridique de son organisation, doit faire preuve de constance, de détermination et être prêt à déployer beaucoup d’énergie pour parvenir à des résultats: « c’est du sport !», dit-il.

Pour ce dernier, ce n’est effectivement pas la structure juridique qui fait la nature d’une entreprise, mais plutôt la mission et les valeurs qui l’habitent et la guident. Sans être des entreprises d’économie sociale, il y a selon lui plusieurs entreprises dans la région de Charlevoix qui appliquent des concepts qui s’y rattachent, notamment celui de la primauté accordée à la personne au-delà des profits. Cela se traduit dans leur façon de prendre des décisions et la nature de leurs activités.

Le point de convergence : la passion

Comme mentionné plus tôt, les projets de la coopérative se sont toujours construits en fonction de sa mission et selon les intérêts des membres qui y adhèrent. « Le point où ça converge et qui fait qu’on existe, c’est la passion. Je mets mes forces à profit pour une mission d’entreprise positive, qui est plus grande que mon petit individu et ça me valorise. Même si les responsabilités sont différentes pour moi, ça reste que c’est la coopérative est à tout le monde. »

Crédit photo: Coop de l’arbre

Ainsi, par leur passion, les membres amènent une valeur ajoutée à l’organisation ; ils nourrissent le projet coopératif. Cette passion autour de la cause environnementale a également rallié de nombreux partenaires qui travaillent en collaboration avec la coop.

En fait, la passion est à la base de tout, selon Antoine Suzor-Fortier. « Les personnes passionnées, peu importe ce qu’elles font, sont à la bonne place dans leur vie. Pour certains membres de la coop, c’est une passion plus militante, pour d’autres c’est plus la liberté. D’autres ont besoin de quelque chose de plus sécuritaire. Même si elle se manifeste différemment, c’est la même passion quand même. »

Avec une notoriété grandissante dépassant les limites de la région, les possibilités de développement sont nombreuses pour la Coop de l’arbre. Nul doute qu’avec des valeurs de coopération si bien enracinées, elle continuera à évoluer à l’image de la passion de ceux et celles qui la composent.

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